La Cour supérieure du Québec tranchait 1 en faveur des ingénieurs et de l'entrepreneur général tous deux impliqués dans un projet de construction. Elle rejetait alors un recours en dommages et condamnait la demanderesse aux frais de justice, confirmant ainsi qu'un propriétaire doit supporter les conséquences de son choix qui lui permettait d'économiser sur le total des travaux.

La demanderesse est une entreprise familiale opérant plusieurs magasins de vente de pièces d'automobiles qui, en 2004, décide de relocaliser un de ses établissements situé à Montmagny. Pour ce faire, elle retient les services d'une firme d'ingénieurs afin de préparer des plans de structure. Devant faire un choix relativement au type de dalle de béton à installer (l'une sur sol et l'autre structurale), la demanderesse opte pour celle sur sol, lui permettant ainsi d'économiser une somme de 100 000 $. Malheureusement, les sols à cet endroit sont instables et, progressivement, la demanderesse constate l'affaissement de la dalle de béton atteignant jusqu'à 50 à 75 millimètres par endroits, ainsi que d'autres inconvénients.

La Cour doit décider si la demanderesse doit ou non supporter seule les conséquences de son choix, puisqu'elle a été dûment informée, par avis écrits de la part des ingénieurs, des risques à envisager.

La Cour s'appuie d'abord sur deux de ses décisions antérieures2 et retient que l'article 2118 C.c.Q. s'applique seulement lorsque la perte de l'ouvrage est en jeu, en raison des dégradations significatives qui risquent d'affecter son intégrité ou sa pérennité. Or, en l'espèce, même si la dalle sur sol est un élément majeur, la solidité du bâtiment n'étant pas en cause, il n'y a pas de dégradation pouvant entraîner une perte sérieuse: 2118 C.c.Q. ne trouve donc pas application.

Quant à la responsabilité des ingénieurs, ceux-ci ont fait part à la demanderesse de l'importance de procéder à une étude de sols par un laboratoire spécialisé. Ils ont eu au moins deux rencontres durant lesquelles la question de la nature des sols dans la région et des problèmes s'y rattachant a été discutée et deux études de sols pour deux propriétés avoisinantes ont même été portées à son attention. La demanderesse voulant néanmoins s'éviter une dépense reliée à ce genre d'étude, les ingénieurs ont rendu des avis écrits quant aux risques à considérer. Les ingénieurs ont conclu qu'ils pouvaient exécuter leur mandat pourvu que la structure d'acier repose sur des pieux battus. Le tribunal conclut que les ingénieurs n'ont pas contrevenu à leurs obligations et souligne que même si la présomption de 2118 C.c.Q. avait été applicable, ils auraient été exonérés au sens de 2119 C.c.Q.

Pour ce qui est de la responsabilité de l'entrepreneur, la demanderesse ne s'est pas déchargée de son fardeau. En effet, une fois les documents de soumission remis à l'entrepreneur, celui-ci a immédiatement contacté les ingénieurs au sujet de la dalle sur sol prévue aux plans afin de s'assurer que la demanderesse avait fait ce choix de façon éclairée. Le tribunal en vient à la même conclusion que pour la responsabilité des ingénieurs.

Footnotes

1 Pièces d'autos GGM inc. c. Constructions R. Paradis inc., 2016 QCCS 74.

2 Assistance aux femmes de Montréal inc. c. Habitations Alexandra, 2008 QCCS 5204 et Habitations des Cônes c. Roy, 2013 QCCS 260.

Les Ingénieurs Et Entrepreneurs Ne Sont Pas Responsables Des Décisions D'Affaires De Leur Client

The content of this article is intended to provide a general guide to the subject matter. Specialist advice should be sought about your specific circumstances.