Dans Gescoro inc. c. Notaire Francis-Pierre Rémillard, la Cour supérieure du Québec a statué que le chèque d'un notaire remis à un vendeur fictif ayant volé l'identité d'une personne pour perpétrer une fraude hypothécaire dans le cadre de la vente d'une propriété, peut être retourné à la compensation en raison de l'endossement frauduleux de celui-ci par le vendeur ayant utilisé l'identité volée du propriétaire de la maison.

Dans les motifs de la décision publiés récemment, la juge Corriveau reconnaît qu'en matière d'endossement frauduleux, le risque de la responsabilité stricte incombe clairement à la partie ayant accepté de négocier le chèque et que celle-ci n'est donc pas détentrice régulière du chèque au sens de l'article 55 (1) de la Loi sur les lettres de change (« LLC ») et de la Règle A4 de l'Association canadienne des paiements (l'« ACP »).

Cette décision est importante car elle reconnaît une nouvelle façon de renverser une transaction frauduleuse, sans laquelle le montant du produit serait autrement disparu, en particulier lorsque le produit du chèque est encaissé par l'intermédiaire d'un centre d'encaissement de chèques, dont la Cour a reconnu qu'il s'agissait d'une industrie un peu risquée devant parfois entraîner des pertes comme dans le présent cas, lesquelles doivent être assumées par Gescoro.

La fraude qui a eu lieu a résulté de la vente d'une propriété, faite à l'insu de son propriétaire qui a été victime d'un vol d'identité. En outre, un complice inconnu agissant comme acheteur a obtenu un prêt hypothécaire assuré par Stewart. Le produit du prêt a transité dans le compte en fidéicommis appartenant au notaire qui a ensuite émis un chèque à l'ordre du vendeur, tiré de son compte détenu à la Banque de Montréal (« BMO »).

Par la suite, la personne utilisant l'identité volée du vendeur a frauduleusement endossé le chèque puis l'a encaissé d'un centre d'encaissement de chèques de la demanderesse, dont les comptes étaient détenus auprès de la Banque Toronto-Dominion (« TD »).

Après la découverte de la fraude, Stewart a indemnisé le prêteur hypothécaire selon les termes de sa police d'assurance titre, puis a demandé au notaire de prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que le chèque soit retourné à la compensation sur la base qu'il portait un endossement frauduleux. Suivant le retour à la compensation du chèque, TD a retourné le produit de celui-ci à la BMO.

En conséquence, d'un centre d'encaissement de chèques de la demanderesse a institué une action contre le notaire pour récupérer le produit du chèque et tentant de convaincre la Cour qu'en vertu de l'article 55 (1) de la LLC, elle était en tout temps détentrice régulière du chèque et ce, nonobstant l'endossement frauduleux.

La Cour n'a pas accepté l'argument selon lequel l'intention du notaire au moment de la transaction était de délivrer le chèque au vendeur fictif et a conclu à juste titre que le notaire a cru à tort avoir affaire avec le vrai propriétaire de la propriété.

La Cour a également conclu que l'endossement était frauduleux et irrégulier en vertu de l'article 48 (1) de la LLC qui prévoit clairement qu'un endossement frauduleux ne confère pas de droits sur le produit.

En concluant que le centre d'encaissement de chèque de la demanderesse a dû assumer la perte selon la LLC et les règles de l'ACP, la Cour a également mentionné que la perte devait faire partie du risque lié à l'exploitation des affaires de cette industrie, en particulier lorsque de grandes sommes d'argent sont en jeu.

Cette décision réitère le principe selon lequel les règles de l'ACP portant sur l'endossement frauduleux de chèques sont destinées à protéger le payeur d'une activité irrégulière.

Me Brault a représenté l'intervenante qui a eu gain de cause devant la Cour Supérieure.

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