En 2008, la Toronto Transit Commission (la « TTC ») a adopté une politique de dépistage de drogues et d'alcool. La politique, entrée en vigueur à l'automne 2010, prévoyait un dépistage de drogues et d'alcool pour les employés occupant des postes critiques pour la sécurité pour certains gestionnaires ainsi que pour certains cadres désignés. La politique prévoyait des tests notamment lorsque l'employeur avait des motifs raisonnables de croire que la consommation d'alcool et de drogue rendait l'employé inapte au travail.

L'Amalgamated Transit Union, Local 113 (le « syndicat ») a déposé un grief à la suite de l'introduction de la politique. Le grief a été soumis à l'arbitrage au printemps 2011.

Même si la politique ne prévoyait pas initialement le dépistage aléatoire de drogues et d'alcool, le TTC l'a modifiée de sorte qu'au moment de son entrée en vigueur en 2011, elle comportait un mécanisme de dépistage aléatoire. La mise en Suvre d'un dépistage aléatoire a toutefois été retardée pendant un certain nombre d'années.

Trois ans après la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, section locale 30 c. Pâtes & Papier Irving, Ltée, 2013 CSC 34, le TTC a finalement décidé d'appliquer les dispositions de dépistage aléatoire de sa politiqe. Le syndicat a donc demandé une injonction afin d'empêcher la mise en Suvre de la composante de dépistage aléatoire de drogues et d'alcool de la politique par le TTC en attendant que l'audition du grief en arbitrage soit terminée. Elle se poursuivait depuis 2011.

Pas d'octroi d'injonction

En avril 2017, la Cour supérieure de justice de l'Ontario a rejeté la demande d'injonction du syndicat.1 Le tribunal a appliqué le critère traditionnel en trois volets en matière d'injonction. Il a examiné si une question sérieuse était soulevée, s'il existait le risque d'un préjudice irréparable si une injonction n'était pas accordée et la « prépondérance des inconvénients », en tenant compte de l'intérêt public.

Le tribunal a rapidement conclu qu'une question sérieuse était soulevée dans le cadre de l'arbitrage de la politique du TTC, à savoir si le seuil requis concernant la preuve d'un problème d'alcool et de drogues en milieu de travail était satisfait.

Toutefois, lorsque le tribunal s'est penché sur la question du préjudice irréparable, il a estimé qu'il n'existait aucun préjudice pouvant être compensé par l'octroi de dommages-intérêts.

En ce qui concerne les considérations sur la protection de la vie privée, le tribunal a conclu que la politique était conçue pour tenir compte des attentes raisonnables des employés en matière de vie privée et protéger celles-ci, tant dans le cadre du dépistage des employés que dans l'utilisation et le traitement des renseignements découlant de ces tests. En outre, les violations de la vie privée, dans le cas où elles seraient établies, pourraient être compensées par l'octroi de dommages-intérêts.

Notamment, le tribunal n'était pas convaincu qu'il y aurait atteinte à la réputation d'employés assujettis au dépistage aléatoire; le tribunal a conclu que l'existence de la politique et le fait que tous les employés assujettis au dépistage seraient testés dans les cinq ans suivant la mise en place de la politique éviterait la stigmatisation y étant associée. Le tribunal n'était pas non plus persuadé qu'un préjudice psychologique découlerait du dépistage, observant l'absence de preuve à cet égard.

Même s'il ne devait pas examiner où penchait la prépondérance des inconvénients étant donné ses conclusions sur la question du préjudice irréparable, le tribunal a noté qu'il aurait conclu que la prépondérance des inconvénients était favorable à la TTC puisque le dépistage aléatoire pourrait détecter la consommation de drogues ou d'alcool et ainsi protéger la sécurité des millions de passagers de la TTC.

Les prochaines étapes

Bien que la décision du tribunal ne soit pas définitive sur la question à savoir si la politique de la TTC sera à terme maintenue par l'arbitre saisi du grief, la conclusion du tribunal en ce qui concerne les considérations en matière de protection de la vie privée prévues dans la politique, entre autres, penchent sans l'ombre d'un doute en faveur de la TTC.

Les employeurs et les professionnels en ressources humaines à l'échelle du Canada surveilleront attentivement la décision qui sera rendue en l'espèce, plus particulièrement ceux qui Suvrent dans l'industrie des transports et qui ont adopté ou qui envisagent d'adopter des politiques de dépistage aléatoire de drogues semblables. Surveillez les développements à venir sur Espace RH!

Footnote

1 Amalgamated Transit Union Local 113 v. Toronto Transit Commission (PDF - disponible en anglais seulement)  

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