La semaine dernière, les quatre règlements destinés à encadrer l'application de la Loi sur le cannabis ont été publiés dans la Gazette officielle du Canada.

Moins d'un mois après la sanction du projet de loi C-45 sur la législation du cannabis, le gouvernement fédéral dévoile les règlements qui s'appliqueront aux activités de production, de distribution, de vente, d'importation et d'exportation du cannabis par les titulaires d'une licence fédérale. La plupart de ces règles s'appliqueront autant aux produits vendus pour l'utilisation par les personnes majeures qu'à ceux vendus à des fins médicales, mais un type de licence spécifique et des règles particulières continueront d'être applicables en ce qui concerne la vente de cannabis à des fins médicales.

Le 17 octobre prochain, lors de l'entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis et de ses règlements, le cannabis deviendra communément réglementé en vertu de la Loi sur le cannabis plutôt qu'en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (ci-après LRCDAS). De plus, le Règlement sur l'accès au cannabis à des fins médicales et le Règlement sur le chanvre industriel, pris en vertu de la LRCDAS, seront abrogés, tandis que quatre nouveaux règlements verront le jour dont deux sont brièvement expliqués dans ce bulletin : le Règlement sur le cannabis et le nouveau Règlement sur le chanvre industriel.

Règlement sur le chanvre industriel

Le chanvre industriel se distingue du cannabis par sa teneur plus faible en tétrahydrocannabinol (ci-après THC). En effet, pour rencontrer la définition de chanvre industriel, les têtes florales et les feuilles du chanvre ne doivent pas contenir plus de 0,3 % de THC, contrairement à des taux dépassant souvent les 12 % pour le cannabis1.

Le nouveau Règlement sur le chanvre industriel pris en vertu de la Loi sur le cannabis est semblable à l'ancien sous la LRCDAS. L'obligation de détenir une licence pour réaliser certaines activités réglementées comme la production, la vente, l'importation et l'exportation de chanvre industriel est toujours présente. De plus, les titulaires d'une licence de culture sont encore tenus de semer que des graines de qualité généalogique provenant d'un cultivar approuvé.

Toutefois, certaines exigences ont été assouplies pour correspondre aux risques plus faibles que pose le chanvre industriel par rapport à d'autres variétés de produits du cannabis. À cet égard, il est intéressant de noter que la vente de plantes de chanvre industriel (fleurs, feuilles et branches) à des transformateurs de cannabis sera permise afin de fournir une source de produits du cannabis à faible teneur en THC et à forte teneur en cannabidiol (CBD).

Il est également à noter que les dérivés (les produits faits à partir de la graine de chanvre industriel) ou produits de dérivés importés, exportés ou vendus en gros demeureront exclus de l'application de la Loi sur le cannabis si la concentration en THC d'un échantillon représentatif de chaque lot du dérivé ou du produit est d'au plus 10 μg/g. Dans ce cas, le produit n'est ni assujetti aux règles en matière de cannabis ni à celles en matière de chanvre industriel, bien qu'il puisse être réglementé par d'autres normes dépendamment de sa nature et des représentations qui y sont liées.

Règlement sur le cannabis

Le Règlement sur le cannabis constitue la pierre angulaire de la réglementation entourant la légalisation du cannabis au Canada. Ce règlement prévoit l'octroi de licences pour la culture, la transformation du cannabis, la vente de cannabis à des fins médicales et les essais analytiques et la recherche sur le cannabis. Ces licences seront assujetties au respect de conditions générales et spécifiques aux activités et sous-activités qu'elles autorisent. Il prévoit également, pour les titulaires de permis et de licence, la possibilité d'importer et d'exporter du cannabis pour des fins scientifiques ou médicales ainsi que du chanvre industriel.

Les exigences générales relatives aux licences

Comme sous le régime actuel, les personnes qui désirent présenter une demande de licence au ministre devront préalablement avertir le service incendie, le corps policier et la municipalité de la région où se trouve le lieu d'exploitation proposé dans la demande. Une nouveauté cependant, le titulaire de licence devra nommer un individu à titre de chef de la sécurité, en plus de nommer un responsable principal comme précédemment requis. Les normes en matière d'habilitation de sécurité délivrée par le ministre demeurent similaires.

L'habilitation de sécurité vise à prévenir les risques pour la santé et la sécurité publique en obligeant notamment qu'un individu qui détient cette habilitation soit présent dans le lieu visé par la licence lorsque des activités sont exercées par d'autres individus dans une zone d'exploitation ou d'entreposage. Le règlement cite, à titre d'exemple, le risque que le cannabis soit détourné vers un marché ou pour une activité illicite.

Par ailleurs, le nouveau poste de chef de la sécurité a pour mission d'assurer le respect des exigences applicables en matière de sécurité physique pour les licences nécessitant des mesures de sécurités accrues telles que celles de culture, de transformation et de vente. Ces exigences prévoient notamment l'utilisation d'un registre pour consigner l'identité des individus entrants et sortant d'une zone d'entreposage, une surveillance constante des lieux à l'aide d'enregistrement visuel et des barrières physiques qui empêchent tout accès entrants et sortants non autorisé aux zones d'exploitation et d'entreposage.

Autre nouveauté, Santé Canada imposera la tenue d'un registre comportant plusieurs renseignements à propos des investisseurs-clés détenant des intérêts dans les personnes morales titulaires de licence de culture, de licence de transformation ou de licence de vente. En outre, les titulaires en question devront divulguer leurs renseignements sur les investisseurs-clés par le biais d'un rapport annuel au ministre.

Finalement, bien que les fabricants de drogues sur ordonnance contenant du cannabis soient principalement assujettis à la Loi sur les aliments et les drogues et ses règlements, ils devront également respecter certaines exigences du Règlement sur le cannabis lorsque la drogue contient du cannabis. À cet égard, les fabricants devront obtenir une licence relative aux drogues contenant du cannabis sous l'égide du Règlement sur le cannabis. Ils devront également se soumettre aux mesures de sécurité physique du règlement si la quantité de cannabis qui leur est vendue ou distribuée dépasse les 600 kg de cannabis séché par année.

Les exigences particulières

Des exigences règlementaires particulières s'appliqueront à la plupart des activités permises en vertu d'une licence. De fait, ces exigences reflètent essentiellement ce qui avait été annoncé par Santé Canada dans le cadre de son Approche proposée en matière de la réglementation du cannabis et dans le document de mars 2018 intitulé Résumé des commentaires reçus au cours de la consultation publique.

Mentionnons à titre illustratif les nouvelles normes d'étiquetage et d'emballage très strictes. Par exemple, les emballages devront être neutres et leurs paramètres seront balisés notamment en ce qui concerne les logos, les couleurs, les images de marque, les mises en garde obligatoires et le symbole normalisé du cannabis. Comme sous le régime actuel, le contenant immédiat dans lequel est emballé un produit du cannabis devra être doté d'un dispositif de sûreté offrant au consommateur une assurance raisonnable qu'il n'a pas été ouvert avant la réception. Quant à l'étiquette apposée sur le contenant d'emballage du cannabis, elle devra contenir des informations obligatoires à l'égard du produit et de la catégorie de produit, des avertissements particuliers, le tout en français et en anglais, ainsi que les coordonnées du titulaire de la licence de culture qui cultive la plante ou les graines.

L'accès au cannabis à des fins médicales

Le Règlement sur le cannabis encadre également l'usage du cannabis à des fins médicales en reprenant de façon substantielle les règles se retrouvant dans le Règlement sur l'accès au cannabis à des fins médicales qui sera abrogé le 17 octobre prochain, date à laquelle la Loi sur le cannabis entrera en vigueur. Ainsi, les patients qui le requièrent pourront continuer d'y avoir accès en s'inscrivant, avec leur document médical, comme client auprès d'un titulaire d'une licence de vente ou en cultivant eux-mêmes des plantes de cannabis. Le patient inscrit sera autorisé à avoir en sa possession dans un lieu public, un maximum de 150 grammes de cannabis séché, alors que la Loi sur le cannabis prévoit jusqu'à 30 grammes pour tous les adultes âgés de 18 ans et plus. Remarquons cependant que la législation provinciale applicable à chaque juridiction peut imposer des critères plus stricts, ce qui est d'ailleurs le cas dans plusieurs provinces.

Les titulaires d'une licence de vente aux fins médicales devront fournir mensuellement des rapports au ministre comprenant notamment des informations sur le nombre de clients inscrits, les transferts de clients à d'autres détenteurs de licence et certaines statistiques de vente comme la moyenne des quantités quotidiennes de cannabis séché indiquée sur les documents médicaux de même que des renseignements sur les praticiens de la santé qui fournissent des documents médicaux.

Les exigences générales et spécifiques énumérées ci-dessus fournissent seulement des exemples des multiples règles et normes qui se retrouvent dans le nouveau règlement de plus de 200 pages.

Les personnes intéressées à se lancer dans l'industrie devront bien examiner les nouvelles règles afin d'assurer leur compréhension des limites imposées aux activités envisagées. Quant aux producteurs autorisés actuels, il est fortement recommandé de mettre en Suvre une solide révision de leurs règles et procédures actuelles afin d'assurer une saine transition de leur entreprise sous le régime de la Loi sur le cannabis et de ses règlements.

Footnote

[1] Gouvernement du Québec, 2018 [En ligne]

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