C'est une chose de prétendre (même à tort) que l'ALENA est le pire accord de libre-échange sur la planète. Le Président Trump vient de le répéter, le 7 septembre dernier, lors d'un discours prononcé dans le Dakota du Nord, où il n'a pas manqué d'ajouter son corollaire habituel, que le Canada en profite indûment, aux dépens de la première puissance mondiale.

De telles déclarations sont exaspérantes, mais sont facilement réfutables. Les statistiques canadiennes et américaines démontrent que les échanges commerciaux bilatéraux sont en hausse constante, à l'avantage mutuel des deux économies. Ces échanges sont par ailleurs remarquablement équilibrés (bien que ni un excédent ni un déficit commercial ne signifierait que ces échanges sont désavantageux ni pour l'un ni pour l'autre).

Mais voici que le Président Trump hausse le ton et dit à ses partenaires commerciaux qu'ils doivent faire des concessions pour éviter une guerre commerciale. Ces partenaires ne peuvent interpréter autrement les déclarations de M. Trump du 7 septembre.

Le Président a clairement indiqué qu'il est prêt à utiliser ses pouvoirs présidentiels pour imposer des tarifs douaniers de 20 % sur les automobiles afin de forcer des concessions commerciales dans des domaines tout autres, non seulement dans le contexte de l'ALENA mais avec tous les partenaires commerciaux qui exportent des voitures aux États-Unis.

Ces déclarations viennent démasquer l'argument de façade avancé par la Maison-Blanche selon lequel les États-Unis doivent envisager des tarifs douaniers sur les automobiles pour assurer en vertu de l'article 232 du Trade Expansion Act of 1962 (oui, « expansion ») la sécurité nationale qui serait prétendument menacée par des importations excessives d'automobiles. Pire, ces déclarations annoncent pour les partenaires commerciaux la fin, au moins dans leurs relations avec les États-Unis, du processus traditionnel et respectueux de négociation. Jusqu'à maintenant, la concession A était accordée en échange d'une concession B, et ce processus assurait une libéralisation mutuelle des échanges. Nous serions maintenant dans l'ère de devoir accorder la concession A pour éviter la mesure dommageable C.

Le Président Trump ne semble pas se soucier de savoir si sa mesure protectionniste C ou sa tactique de négociation  sont ou non compatibles avec les engagements des États-Unis aux termes des accords de l'OMC.

Il a d'ailleurs renchéri, brandissant deux fois le mot, en anglais, « ruination » : « Pour certains pays, comme le Canada, un tarif sur les automobiles serait la ruine du pays. C'est aussi important que ça. La ruine du pays ». Il ne s'agit pas ici simplement d'utiliser la menace pour forcer un partenaire plus petit à accorder une concession. Il s'agit de menacer ce plus petit partenaire de « ruine », comme il l'a répété, si celui-ci n'acquiesce pas à la concession demandée, et ce gratuitement, sans contrepartie du partenaire plus puissant.

Tous ceux qui constatent que des décennies de croissance solide ont été le fruit d'un commerce international et de la réduction parfois lente mais constante des barrières commerciales, doivent espérer que ces déclarations ne sont que fanfaronnades de négociateur, que la menace relève davantage de ton et de style que de fond, et que les organes institutionnels et législatifs américains n'oublieront pas ce que les États-Unis savent depuis au moins la Seconde Guerre mondiale : le progrès exige un leadership de principe, et non des menaces de guerre économique.

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