PAS BESOIN DE VOUS DÉPLACER !

Telle est la réponse à la question : « Vous avez une démarche à faire ? » sur le site préféré des Français : impots.gouv.fr. Pour être complet et éviter au maximum le contact avec « l'usager » (beurk...), la réponse type incite également les assujettis à ne pas non plus décrocher leur téléphone. En coulisse, des notes de service sont encore plus explicites : « Orienter les usagers vers les services en ligne... Eviter la facilitation de la délivrance des documents papier sans attente »...

Indépendamment de la destination – fiscale ou non – il faut de toute façon éviter de se déplacer sur des routes que nombre de départements ont cessé d'entretenir correctement faute de crédits budgétaires suffisants : - 9% sur les trois dernières années. Le nid de poule guette l'automobiliste, surtout s'il est tapis dans l'ombre.

En effet, il faut aussi éviter de rouler nuitamment sur quelque réseau routier que ce soit puisque, sous le prétexte d'éviter la « pollution lumineuse » (concept né dans les années 80, sans doute à la suite d'un flash), il s'agit en réalité d'éviter des dépenses de consommation électrique. Les lampadaires sont devenus ridicules mais tout le monde semble se moquer de la dignité des lampadaires. Les chiens acquièscent : on vous l'avait bien dit... Le plus intéressant, sans doute, est que la mode de l'extinction de l'éclairage public s'est propagée après un effort d'investissement massif destiné à le moderniser et à réduire sa consommation (lampes led, optimisation de la hauteur des mats, etc.). Pour justifier cela, on explique sans rire que l'insécurité n'est pas plus grande – les voleurs ayant peur du noir – et qu'en voiture on voit mieux sans éclairage des carrefours. Attendons les procès pour vérifier ces théories venues d'ailleurs.

Deux enseignements très brefs à tirer de cette situation. Le premier est d'ordre général : tout se passe comme si les impôts finançaient désormais une administration autarcique, évitant les usagers et négligeant de remplir certaines de ses missions essentielles. La contrainte financière se fait sentir, mais pas pour les dépenses de personnel qui continuent à progresser sous le double effet des recrutements dans les collectivités locales et des revalorisations automatiques à l'ancienneté.

La deuxième conclusion, plus spécifique, est que le déplacement n'est plus à la mode. Il faut l'éviter au maximum : c'est ce que nous dirons bientôt solennellement les 40 000 délégués et 3 000 journalistes venus du monde entier pour participer à la COP 21.

SOURCES

JURISPRUDENCE

Acte détachable d'un contrat de droit privé. Différence avec le recours «Tarn-et-Garonne». La CE statue sur deux requêtes de groupes de requérants qui lui avaient demandé l'annulation pour excès de pouvoir d'une série d'actes et de décisions relatifs au transfert au secteur privé d'une participation majoritaire au capital de la SA de l'aéroport Toulouse-Blagnac. S'agissant de la demande d'annulation de l'acte de cession signé par le représentant de l'APE, il juge qu'une telle demande relève de la compétence des juridictions judiciaires au motif que le contrat pour la cession et l'acquisition d'actions entre l'Etat et le consortium en cause est étranger à l'exécution du service public aéroportuaire et qu'aucune de ses clauses n'implique qu'il relève du régime exorbitant des contrats administratifs. Après avoir rejeté les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance (REP contre les avis de la commission des participations et des transferts et contre le refus de communication de ces avis), le Conseil juge que la décision des ministres révélée par le communiqué de presse du 4 décembre 2014 désignant le consortium "Symbiose" en qualité d'acquéreur pressenti constituait la décision de sélection. Elle avait donc le caractère de décision administrative faisant grief et constituait un acte détachable du contrat de droit privé de cession de la participation, susceptible de REP devant le juge administratif. Il renvoie ensuite ces recours devant le TA de Paris, compétent compte tenu du caractère non-règlementaire de la décision en cause (CE, 27 octobre 2015, n°386595). 

Marchés publics et Code de commerce. La CCI des Ardennes avait conclu avec une société un marché à bons de commande ayant pour objet des prestations de formation. Cette société avait saisi le juge administratif afin que la CCI soit condamnée à lui verser une somme en réparation du préjudice qu'elle indiquait avoir subi du fait de la rupture unilatérale des relations commerciales. Le TA ayant rejeté sa demande, elle a interjeté appel. La CAA de Nancy a relevé que le marché en cause « qui entre dans le champ d'application du Code des marchés publics, a le caractère d'un contrat administratif; qu'il suit de là que le moyen tiré de la rupture abusive de ce marché public en méconnaissance des dispositions du 5° de l'article L. 442-6-1 du Code de commerce, qui ne sont pas applicables au litige, ne peut qu'être écarté comme inopérant ». Les dispositions du Code de commerce relatives à la rupture unilatérale des relations commerciales n'est pas applicable au contentieux des marchés publics (CAA Nancy, 27 octobre 2015, Société Cogest, n°15NC00242).

Sous-traitance d'un marché public. Acte spécial. Une société titulaire d'un marché public attribué par le STIF pour la réalisation d'études géotechniques avait déclaré sous-traiter certaines des prestations. Suite au refus de la société titulaire et du STIF de payer certaines factures, le sous-traitant avait saisi le juge des référés afin que le STIF soit condamné à lui verser une provision. Sa demande ayant été rejetée, la société a interjeté appel. La CAA a souligné que si les dispositions du Code des marchés publics et de l'article 3 de la loi relative à la sous-traitance « ont en principe vocation, d'une part, de permettre au sous-traitant d'obtenir directement, par le pouvoir adjudicateur, le paiement de l'intégralité des prestations qui lui ont été sous-traitées et, d'autre part, de permettre au pouvoir adjudicateur de contrôler la part de sous-traitance qu'il consent au titulaire du marché, elles ne font toutefois pas obstacle, par elles-mêmes, à ce que les entreprises liées par un contrat de sous-traitance, auquel le pouvoir adjudicateur n'est pas partie, puissent, de manière occulte, augmenter la part de cette sous-traitance ; que, dès lors, le montant de la sous-traitance figurant dans l'acte spécial n'est pas à lui seul suffisant, en cas de litige, pour établir le montant de la sous-traitance qui a été réellement convenu entre les parties à un contrat de sous-traitance ». En l'espèce, le juge a estimé qu'il n'était pas en mesure de déterminer si le montant de la sous-traitance donnant droit au paiement direct est seulement celui indiqué par l'acte spécial ou celui dont se prévaut la société sous-traitante (CAA Paris, 23 octobre 2015, Société Unisol, n°15PA00263).

Appel d'offres. Exclusion d'un candidat. Une administration de la région de Sicile avait exclu des sociétés d'une procédure d'appel d'offres en se fondant sur l'absence de dépôt de la déclaration d'acceptation des clauses qui devait accompagner l'offre. Une question préjudicielle avait alors été posée à la CJUE par le juge italien, portant sur l'interprétation des dispositions de l'article 45 de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004 relatives à l'exclusion de certains candidats à la participation à un marché public. Selon la CJUE, « les règles fondamentales et les principes généraux du traité FUE, en particulier les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination ainsi que l'obligation de transparence qui en découle, doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une disposition de droit national en vertu de laquelle un pouvoir adjudicateur peut prévoir qu'un candidat ou un soumissionnaire soit exclu automatiquement d'une procédure d'appel d'offres relative à un marché public pour ne pas avoir déposé, avec son offre, une acceptation écrite des engagements et des déclarations contenus dans une convention de légalité, telle que celle en cause au principal, dont l'objectif est de lutter contre les infiltrations de la criminalité organisée dans le secteur des marchés publics ». Cependant, en l'espèce, la convention obligeait le soumissionnaire à déclarer qu'il ne se trouvait pas dans un rapport de contrôle ou d'association avec d'autres concurrents, et qu'il n'avait pas conclu et ne conclurait pas d'accord avec d'autres participants à la procédure d'appel d'offres. La Cour a jugé que l'absence de telles déclarations, ne pouvait pas avoir pour conséquence l'exclusion automatique de la procédure (CJUE, 22 octobre 2015, Impresa Edilux SRL c/ Assessorato Beni Culturali e Identità Siciliana, aff. C-425/14).

GOUVERNEMENT

Marchés publics. La Direction des affaires juridiques de Bercy a rendu public le contenu du projet de décret relatif aux marchés publics soumis à l'ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 et qui fait l'objet d'une consultation jusqu'au 4 décembre prochain.

Relations public-Administration. La secrétaire d'Etat chargée de la réforme de l'Etat et de la simplification a présenté des décrets fixant les exceptions au principe « le silence de l'administration vaut acceptation » dans les collectivités territoriales et leurs établissements publics et dans les organismes chargés d'une mission de service public. Un peu plus de 70 % des procédures éligibles relèveront du principe « silence vaut acceptation » à compter du 12 novembre 2015 (Conseil des ministres du 5 novembre 2015).

UNION EUROPÉENNE

Marchés publics et fonds européens. La Commission européenne a présenté jeudi 29 octobre 2015 un guide de bonnes pratiques sur la problématique de la gestion des fonds structurels européens dans les marchés publics afin de permettre une utilisation optimale des fonds structurels et d'investissement européens. Il n'a pas de valeur contraignante (Guide d'orientation à destination des praticiens: "Comment éviter les erreurs les plus fréquentes commises dans le cadre des marchés publics de projets financés par les Fonds structurels et d'investissement européens").

PRATIQUE

RÉUTILISATION DES DONNÉES ET CONTRATS PUBLICS

L'ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques a posé le principe de la libre réutilisation des "informations publiques". La possibilité de réutiliser les données produites par et pour l'Administration engendre la question de la propriété de ces données et des bases qui les contiennent. Selon le cadre contractuel qui lie l'Administration à son cocontractant, la question de la propriété se pose différemment.

Dans le cas où l'Administration a attribué un marché public, seuls les CCAG PI et TIC présentent des stipulations spécifiques relatives à la propriété des bases de données réalisées dans le cadre de ces marchés. Ils prévoient deux options: soit les bases de données réalisées peuvent librement servir à d'autres fins que celles du marché, soit le titulaire cède à titre exclusif au pouvoir adjudicateur le droit de les exploiter. Les autres CCAG ne prévoient rien de tel. Sauf stipulation contraire du marché, le titulaire pourrait alors jouir de la protection du droit d'auteur et des articles L.341-1 et suivant du Code de propriété intellectuelle. Il bénéficierait ainsi d'une protection du contenu de la base et pourrait interdire l'extraction de ce contenu ou sa réutilisation par mise à disposition du public. En conclusion, en l'absence de stipulations du contrat relative à la propriété des bases éventuellement produites dans le cadre de l'exécution du marché, le pouvoir adjudicateur ne disposerait d'aucun droit sur celles-ci et le titulaire pourrait les réutiliser à d'autres fins, y compris commerciales.

Dans le cas d'une délégation de service public, il est nécessaire d'identifier les finalités des données d'exploitation car selon l'affectation du bien, son régime ne sera pas le même. Ainsi, alors que l'on regarde les biens de retour comme étant la propriété du délégant depuis le moment de leur acquisition ou réalisation, les biens de reprise sont eux regardés comme étant la propriété du délégataire pendant toute la durée du contrat. Les biens propres du délégataire non affectés à la continuité du service public restent sa propriété au terme du contrat.

Il faut donc déterminer si les bases de données sont indispensables à la continuité du service public afin de connaître leur régime de propriété (Pour aller plus loin : E. Varet, Y. Pons, La propriété des données produites ou reçues par les cocontractants de l'Administration, Contrats et marchés publics, Octobre 2015, p.85)

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