1. De la protection du payeur. Le prélèvement est, par définition, un instrument de paiement dangereux, presque contre-nature, puisque ce n'est pas le payeur qui paye, mais le bénéficiaire ; ou, plus exactement, le bénéficiaire qui « initie » (vocabulaire DSP 2, il s'agissait auparavant d'« ordonner ») l'opération de paiement, qui « donne un ordre de paiement au prestataire de services de paiement du payeur, fondé sur le consentement donné par le payeur au bénéficiaire et, le cas échéant, par l'intermédiaire de son propre prestataire de services de paiement » (CMF, art. L. 133-3, II, c).

Deux règles, au moins, dans notre Code monétaire et financier (CMF), protègent le payeur, ainsi dépossédé de l'initiative du paiement. La première retarde le moment d'irrévocabilité de l'ordre de paiement, censément acquis une fois qu'il a été reçu par le prestataire de services de paiement (PSP) du payeur (CMF, art. L. 133-8, I), voire lorsque ce dernier l'a transmis au bénéficiaire ou lui a donné son consentement à l'exécution de l'opération de paiement (CMF, art. L. 133-8, II, al. 1er). « Toutefois, nous dit l'alinéa 3 du point II de l'article L. 133-8, en cas de prélèvement et sans préjudice du droit à remboursement mentionné à l'article L. 133-25, le payeur peut révoquer l'ordre de paiement au plus tard à la fin du jour ouvrable précédant le jour convenu pour le débit des fonds. »

La seconde règle est donc ce droit à remboursement de l'article L. 133-25, qui se dédouble en réalité en deux droits :

  • l'un, qui doit être exercé dans un délai de huit semaines à compter de la date à laquelle les fonds ont été débités (huit semaines augmentées d'un délai de dix jours afin que le PSP rembourse ou justifie son refus de rembourser), est commun au paiement carte et au prélèvement : « Le payeur a droit au remboursement par son prestataire de services de paiement d'une opération de paiement autorisée, ordonnée par le bénéficiaire ou par le payeur qui donne un ordre de paiement par l'intermédiaire du bénéficiaire, si l'autorisation donnée n'indiquait pas le montant exact de l'opération de paiement et si le montant de l'opération dépassait le montant auquel le payeur pouvait raisonnablement s'attendre en tenant compte du profil de ses dépenses passées, des conditions prévues par son contratcadre et des circonstances propres à l'opération » (CMF, art. L. 133-25, I, al. 1er) ;
  • et puis l'autre, qualifié de « droit au remboursement inconditionnel », qui veut que « sans préjudice des dispositions prévues à l'article L. 133-25-2, en cas de prélèvements visés à l'article 1er du règlement (UE) n° 260/2012, le payeur jouit d'un droit au remboursement inconditionnel dans les délais fixés à l'article L. 133-25 » (CMF, art. L. 133-25-1).

Or tant l'un que l'autre présentent cette particularité remarquable qu'ils permettent le remboursement d'une opération de paiement « autorisée » (certes autorisée sans quantum exact dans le premier cas, mais tout de même), suivant en cela le principe directeur posé au considérant 76 de la DSP 2 : « Afin d'assurer l'adhésion du grand public au SEPA et un niveau élevé de protection des consommateurs au sein du SEPA, le schéma de prélèvement paneuropéen en vigueur prévoit un droit au remboursement inconditionnel pour les paiements autorisés. Dans le même ordre d'idées, la présente directive vise à instaurer un droit inconditionnel au remboursement en tant qu'exigence générale pour toutes les opérations de prélèvement libellées en euros dansl'Union [1]. »

Voilà donc quelles sont les règles protectrices du payeur prélevé, qui lui permettent en quelque sorte de revenir sur son consentement, dissocié de l'ordre. Mais, précisément, l'expression de ce consentement est-elle encadrée ? Le fameux « mandat de prélèvement » fait-il l'objet de dispositions autres que celle-ci : « Une série d'opérations de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à l'exécution de la série d'opérations, notamment sous la forme d'un mandat de prélèvement » (CMF, art. L. 133-6, II, rédaction DSP 2) ?

2. L'arrêt du 24 mai 2018. M. et Mme X... assignent leur banque en indemnisation du préjudice « moral » (sic !) subi du fait de prélèvements effectués sur leur compte au profit de la société EDF sans leur autorisation. Le juge de première instance rejette toutefois leur demande, motif pris que la banque n'était pas intervenue pour la mise en place des prélèvements litigieux et n'avait aucun pouvoir pour les autoriser ou les empêcher.

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