Alors que la pandémie mondiale de la COVID-19 persiste à avoir un impact sur les employeurs canadiens, plusieurs d'entre eux songent à entreprendre des restructurations et à réduire leurs effectifs. En réduisant le nombre d'employés, certains employeurs devront cependant faire face à la difficile décision de rompre le lien d'emploi d'employés qui sont en congé de maladie. Plusieurs employeurs hésitent à congédier des employés en congé de maladie en raison d'éventuels enjeux en matière de droits de la personne, mais il arrive que des employeurs n'aient tout simplement pas la capacité de conserver ces employés. Un employeur peut-il congédier un employé en congé de maladie lors d'une restructuration sans responsabilité relative aux droits de la personne? Le Tribunal canadien des droits de la personne (le « Tribunal ») a étudié la question dans la décision O'Grady c. Bell Canada.

Les faits

L'employée en question souffrait d'un trouble mental et alléguait qu'elle avait été victime de discrimination de la part de son employeur en étant congédiée sans motif valable dans le cadre d'une restructuration.

L'employée, spécialiste du Web comptant 19 ans d'ancienneté, était en congé de maladie et était admissible à des prestations d'invalidité de courte et de longue durée. Elle était en cours de finalisation d'un plan de retour au travail, qui comprenait un retour au travail progressif, lorsque l'employeur l'a informée que son poste avait été aboli dans le cadre de son plan de réorganisation. Son employeur avait aboli 2 500 postes lors de cette restructuration. En conséquence de son congédiement, l'employée n'était plus admissible aux prestations d'invalidité de longue durée.

L'employée plaidait que son ancien employeur avait fait preuve de discrimination à son égard en mettant fin à son lien d'emploi, puisque selon elle, son congédiement était, au moins en partie, dû à ses problèmes de santé mentale et aux prestations d'invalidité qu'elle recevait. L'employée ajoutait que l'employeur avait failli à son devoir de l'accommoder en lui retirant ses prestations d'invalidité de longue durée. L'employeur, quant à lui, affirmait que le congédiement de l'employée était uniquement dû à la réduction des effectifs effectuée dans le cadre du plan de restructuration de l'entreprise.

La décision du Tribunal

Le Tribunal a conclu que l'employeur n'était pas coupable de discrimination, puisque l'employée avait été incapable de démontrer qu'elle avait été congédié en raison d'un handicap. Le fait qu'elle était en congé d'invalidité n'était pas  suffisant pour établir le lien requis entre la perte d'emploi et le motif de distinction illicite qu'est l'handicap. L'employée avait le fardeau de faire la preuve de démontrer que son congédiement était lié à sa déficience. L'employée a été incapable de présenter de la preuve concrète à cet effet. Il n'y avait aucune preuve que les personnes ayant pris part au processus décisionnel concernant son congédiement étaient au courant de sa condition médicale, puisque son dossier était géré par une entreprise externe. En d'autres mots, qu'elle ait été en congé de maladie ou pas, son emploi aurait été aboli de toute façon.

Pour répondre aux allégations selon lesquelles l'employeur aurait failli dans son devoir d'accommoder la plaignante, le Tribunal a fait remarquer que l'obligation d'accommodement « n'oblige pas l'employeur à maintenir un poste existant pour un employé [en congé de maladie] alors qu'une restructuration de l'entreprise est en cours ». Le Tribunal a par ailleurs rajouté que « l'employeur qui procède à une restructuration peut même remplacer l'employé, pour autant que sa décision ne soit pas entachée par des considérations de nature discriminatoire ».

Ce que cela signifie pour les employeurs

Comme c'est le cas pour tous les enjeux éventuels liés aux droits de la personne, les employeurs doivent faire preuve de prudence. Les employeurs doivent être en mesure de démontrer que leurs décisions relatives à des terminaisons d'emploi ne sont pas liées à des considérations qui ne pas appropriées. Des preuves documentant les raisons de telle décision aideront fortement à rejeter toute prétention voulant qu'un congédiement ait pu être discriminatoire. Mettre fin au lien d'emploi d'un employé en congé de maladie en raison d'un accident de travail, cependant, pourrait mener à d'autres considérations juridiques; tout employeur devrait, dans ces circonstances, faire appel à des conseillers juridiques. 

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